Histoire des mentalités et histoire sociale - Marc Bloch et le servage

Comme l’explique Nicolas Carrier, professeur d’histoire médiévale à l’université Lyon 3, le problème du servage a occupé Marc Bloch tout au long de sa vie scientifique, depuis ses premières recherches doctorales sur l’Île-de-France. Sa vision est définitivement constituée au tournant des années 30 et exprimée dans une série d’articles importants.

Le plus célèbre – et aussi le plus contesté – est celui qu’il a consacré aux colliberti des Xe-XIIe siècles. Deux axes caractérisent son approche : il convient selon lui de considérer d’abord le servage d’abord comme un fait de mentalité ; l’historien doit éviter de substituer à la doctrine du passé sa propre interprétation : sont serfs les hommes et femmes que les gens du Moyen Âge considèrent comme tels. 

Parue après la mort de Marc Bloch, une virulente critique de Léo Verriest attaque frontalement ces deux points. Elle a reçu un écho considérable chez les médiévistes. Néanmoins, elle revient à critiquer non seulement les interprétations blochiennes, mais encore la doctrine de biens des juristes médiévaux et modernes. Alors que les historiens ont désormais rassemblé une masse considérable de données nouvelles, un retour aux approches de Marc Bloch offre certainement les pistes les plus prometteuse pour la très nécessaire synthèse qui reste à faire.